Au pays du million de « pouêt-pouêt » 22 mars, 2009
Posté par mamoudoukane dans : Edito , ajouter un commentaireBonjour à tous et à toutes,
Pays complexe, s’il en est, la Mauritanie traverse depuis presque 25 ans une zone de turbulences…violentes par moments, comme en 1989. Depuis l’été 2005 on croyait les choses arrangées, mais il n’en était rien… Le 6 août est passé par là.
Au pays du « ch’tary », des soi-disants poètes, de la gabegie érigée en moyen (de survie tribale), du thé (tout de même), et du « on-lave-notre-linge-sale-en-famille-mais-on-n’en-parle-pas », l’étranger néophyte des traditions locales, et de la propension mauritanienne à noyer le poisson aura difficilement une grille de lecture des comportements sociaux.
Je me propose dans ce nouveau blog, à travers quelques poèmes (on ne se refait pas en tant que mauritanien), articles économiques et culturel, quotidiennement, de vous dresser, le plus subjectivement (et objectivement pour les articles), un portrait de cette Mauritanie en mosaïque, qui a encore son avenir devant elle.
En espérant bénéficier de vos critiques constructives, et de vos commentaires. Amicalement.
Vive la Mauritanie des jeunes!
Mamoudou Lamine Kane
Journaliste à La Tribune
Portrait de Béchir Malum 24 mars, 2009
Posté par mamoudoukane dans : Culture , ajouter un commentaireBéchir Malum, un conteur graphique tout en lumière
Parmi nos artistes graphiques qui se révèlent de plus en plus, Béchir Malum ould Jidou tient sûrement une place particulière dans ce microcosme. De par sa jeunesse mature, qui se reflète dans une peinture où fusent ses sentiments et ses pensées, et de par les fenêtres qu’il ouvre sur nos origines.
Les couleurs brique, safran, sepia, brun, rouge, bleu intense imprègnent les tableaux abstraits pour l’essentiel, de Béchir Malum. Ceux-ci, huiles, pastels, colorants pour peinture en bâtiment, sable, pigments trouvés sur place, sont passés du figuratif à l’abstrait. «L’Islam n’incite pas aux représentations trop précises, trop directes, de visages, d’êtres humains, j’ai donc penché tout naturellement vers l’abstrait qui m’ouvrait d’autres portes d’inspiration» murmure-t-il derrière sa barbe de plusieurs jours. Ce jeune métisse de 26 ans (son père est maure et sa mère libérienne), confiant dans l’avenir de l’art en général, et particulièrement graphique, en Mauritanie, s’inquiète tout de même de l’état moribond de l’art mauritanien: «L’art est mort ici. Vous n’avez qu’à traverser le fleuve Sénégal pour le percevoir clairement. En arrivant au Sénégal, vous voyez un pays qui respire l’inspiration, car celle-ci est motivée par toute une population qui s’y intéresse de près ou de loin, un minimum. Ce qui n’est pas le cas en Mauritanie, où seuls les étrangers achètent les toiles locales». Un cri d’amertume, mais aussi d’espoir. Car effectivement, seul le centre culturel français quasi exclusivement, expose ces jeunes talents, de rares fois le musée national. Ses tournées africaines (Sénégal, Mali), et surtout son exposition dans la ville d’Arles en juin 2007, lui ont permis d’ouvrir sa création graphique, ses pensées, à un certain universalisme. «La peinture est un genre qui peut toucher tout le monde. Une peinture mongole peut vous émouvoir, même si vous ne parlez pas mongolien; de la même façon, moi, petit mauritanien peut toucher un péruvien à l’autre bout du monde. Un dessin vaudra toujours mieux que mille discours» développe-t-il les yeux pétillants. «Il a déjà su constituer une oeuvre personnelle, jeune encore mais rigoureuse, nourrie de son expérience mauritanienne: les bleus profonds éclosent comme issus d’un rêve, les cadrages précis équilibrent le tableau, des signes archaïques soulignent une mémoire multiculturelle, le regard de Béchir est subjugué par son second pays d’origine, qu’il traduit dans l’abstraction la plus personnelle et la plus intime» décrit Nicole Vignote, propriétaire d’une boutique d’art à Tevragh Zeina.
(A Arles, en France en juin 2007)
Dans un pays où la plupart des artistes vivent difficilement de leur art, Béchir s’en sort «assez bien», en arrondissant ses fins de mois avec des illustrations pour le ministère de la culture, dans le cadre d’ouvrages nationaux. Pourtant, «les artistes de grande qualité sont nombreux à Nouakchott, mais la culture n’est pas encore la panacée ici, donc ils galèrent. Moi j’ai eu de la chance on va dire» lâche-t-il songeur. Derrière une apparence de prime abord décontractée, se révèle un jeune homme, avec une vision de son art, et de sa mue tardive dans son pays.
«Je suis un artiste engagé sous toutes ses formes. J’utilise des signe hérités des nomades touaregs, des symboles, pour exprimer mes pensées, mes sentiments, faire passer des messages, raconter des histoires» confie-t-il tout sourire. Optimiste dans l’âme, un conteur graphique tout en lumière et en fenêtres s’ouvrant sur la vie.
MLK
Or mauritanien 23 mars, 2009
Posté par mamoudoukane dans : Economie , ajouter un commentairePour qui brille l’or mauritanien?
Tasiast a lancé ses travaux d’extraction minière il y a deux ans maintenant. Depuis tout ce temps, les informations qui devaient parvenir au public demeurent encore partielles. Une telle situation va aux antipodes des principes et critères qui gouvernent l’initiative pour la transparence dans les industries extractives à laquelle la Mauritanie a adhéré depuis septembre 2005.
Situation similaire à celle du Mali ?- Le silence qui perdure par rapport aux revenus et à la question environnementale est révélateur d’un certain manque de transparence. Mieux encore, les autorités issues de la Transition démocratique avaient fait des promesses durant le lancement des activités de la filiale de la société canadienne Rio Narcea Gold Mine ltd, Tasiast. «La Mauritanie a pourtant instauré une fiscalité de l’activité minière allégée et stabilisée sur toute la période de validité des titres miniers» explique Mohamed Ould Yahya , responsable des titres miniers au Ministère des Mines et de l’Industrie. Dans le même état d’esprit, elle a adhéré en septembre 2005, à l’ITIE (Initiative de Transparence des Industries Extractives). Il semble toutefois que le Comité en charge de la transparence n’a pas encore été invité à des visites de terrain pour avoir une idée sur l’exploitation de l’or en Mauritanie. Seule la SNIM aurait eu ce privilège. A la société Tasiast, Mohamed Lemine Ould Baba, Directeur de projet élude la question en lançant «si vous voulez des informations chiffrées, contactez la Banque Centrale ou le ministère compétent sur la question, ou écrivez-nous officiellement». La Banque centrale est effectivement compétente pour les hydrocarbures, pour lesquels le ministère des Finances a délégué les prérogatives relatives à la gestion du fonds national des revenus des hydrocarbures (FNRH). Mais celles-ci sont limitées aux hydrocarbures, pas aux mines, et encore moins à l’or.
(Tasiast aussi discrète qu’opaque)
Pourtant les espoirs sont grands- Lors du coup d’envoi de l’exploitation de la mine d’or à Tasiast en juillet 2007, le projet présentait des chiffres qui avaient tourné pas mal de têtes. Un mirage semblable à celui du pétrole? Réalisé conformément aux normes internationales pour la protection de l’environnement, avec une durée de vie d’environ dix ans, la production était estimée annuellement à 11.000 onces, soit 4 tonnes d’or et 400 emplois directs. Des espoirs qui avaient tenu en haleine les Maliens avant qu’ils ne déchantent. «L’or enrichit les multinationales, pas l’Etat», s’exclamait dans un entretien avec les médias maliens, Brahima Koné, Président de l’Union interafricaine des droits de l’homme, une organisation panafricaine non gouvernementale qui œuvre pour la promotion et la défense des droits de l’homme. Pour lui, l’exploitation aurifère a eu peu d’effet d’entraînement sur l’économie de ce pays. Le secteur n’emploie que quelques dizaines de milliers de travailleurs, alors que la culture du coton fait vivre plus de trois millions de personnes. «Au niveau local, il y a eu quelques créations d’emplois qui ont permis de réduire la pauvreté » explique Brahima Koné. Pour le reste, poursuit-il «les multinationales exportent l’or à l’état brut. Le traitement du minerai se fait en Suisse, au Canada ou en Afrique du Sud. La part revenant au Mali est dérisoire.» Une part d’autant plus maigre que l’Etat est privé de recettes pendant les cinq premières années d’exploitation. En effet, pendant cette période, le code minier malien de 1991 octroie aux entreprises minières des exonérations fiscales. Un cadeau qui pousse ces entreprises à surexploiter les gisements dès le début.
(Akjoujt ne profitera pas pour le moment de son or)
Licenciements abusifs et mauvais traitements- Situées à un peu moins de 250 kilomètres au nord-est de Nouakchott, dans la Wilaya de l’Inchiri, les mines d’or de Guelb Mogrein, celles exploitées par la société Mines de cuivre de Mauritanie (MCM), (détenue par la société canadienne First Quantum Mineral à 80%, la firme émiratie Wadi Arrawda, avec 19% et l’australienne General Gold International (1%)) et les mines exploitées par Tasiast à 100 kilomètres au nord d’Akjoujt, sont représentatives des paradoxes relevés dans le secteur aurifère en Mauritanie. Ce sont des mines à ciel ouvert dont le coût d’extraction est très faible. Mais les salariés se sont plaints, au vu des résultats réalisés, de ne pas recevoir la gratification pourtant prévue par les textes. «La Société TASIAST Mauritanie, chargée de l’exploitation aurifère dans le Nord du pays, se distingue par son degré d’harcèlements et de mauvais traitements qu’elle inflige à ses travailleurs pour lesquels elle ne ressent aucune considération. La recette spéciale trouvée par la direction générale de TASIAST est d’abord et avant tout de chercher moult prétextes et subterfuges pour se débarrasser d’un travailleur avant même la fin de sa période d’essai, afin d’échapper au paiement des droits de licenciement» dénonçait en fin 2007, Me Ahmed Ould Mohamed Lemine, avocat au barreau de Nouakchott qui s’est constitué en défenseur des intérêts des populations d’Akjoujt. Ibrahim Lamine Wane, responsable à la Direction des mines et de la géologie souligne pour sa part, que son organisme ne s’intéresse qu’à «la bonne marche des opérations d’extraction. Pour le reste, notre département n’est pas concerné.» Après le semi mirage de l’or noir, les pierres dorées ne seront pas la panacée mauritanienne semble-t-il. Elles empruntent nuitamment la route du Port pour des destinations inconnues.
MLK
Mots ris, tant niés 22 mars, 2009
Posté par mamoudoukane dans : Poésie , ajouter un commentaireAux carrefours rougis de Nouakchott, Les arrogances sans socles aux volants; En trombe sur les chemins en nids-de-poule, Fusent vers on ne sait quelles vaporeuses occupations. Dans un des intérieurs opulents de l’ilot de richesse De la capitale, les lèvres pincées de la dame En basin riche, psalmodient les éternelles litanies, Les doigts gonflés de métaux précieux Cachant difficilement le rubis sous le tapis. Au pays du million de «pouêt-pouêt», Du demi-million de phares xénon, Et des milliards de grains de sable, Les imprécations sur l’Un s’emboîtent Aux litanies sur les vertus de la luxure. Tant de foi greffée sur la moelle de la cupidité, Entre comptes et ventres bien garnis! Tant d’émois sur le compte de la morale Quand celle-ci vacille dans les limbes dorés! Dans les intimités de ces crépuscules, Les pensées noircissent, chauffées à blanc. Lorsque pour les éclaircir, on retourne à la solitude, On y trouve l’ombre qu’elle y a répandue.
MLK